Performance logistique: L’Observatoire conteste l’indice de la Banque mondiale
L’Observatoire marocain de la compétitivité logistique (OMCL) livre enfin ses premiers indicateurs depuis son entrée en fonction en 2013. Sur une centaine d’indicateurs identifiés, l’Observatoire s’est attaché à en calculer une vingtaine parmi les plus significatifs.
«Nous avons priorisé les indicateurs en fonction de leur importance et de leur poids pour refléter la performance logistique. L’Observatoire a lancé des études pour élaborer un indicateur sur la performance logistique sur la base d’études auprès des opérateurs», explique Rachid Tahri, président de l’Observatoire. Parmi les indicateurs retenus figurent la contribution au PIB, l’investissement, la formation, les créations d’emploi…
La publication de ces premiers indicateurs intervient quelques semaines après la diffusion de l’indice de performance logistique «Connecting to Compete 2018: Trade Logistics in the Global Economy» de la Banque mondiale. Celui-ci classe le Maroc à la 109e position sur une liste de 160 de l’échantillon. Soit un recul de 23 places. L’indice s’appuie sur l’appréciation des répondants nationaux et internationaux à l’enquête de la Banque mondiale.
Certains ne sont pas toujours installés au Maroc. «Il ne tient pas compte des infrastructures tels que les ports et les aéroports ni la taille du réseau autoroutier par rapport à la population alors que ce sont des paramètres indispensables à l’appréciation de la compétitivité logistique. Le Maroc ne peut pas reculer dans l’indice de performance logistique sinon cela voudrait dire qu’il a détruit l’infrastructure qui existe déjà», précise le président de l’Observatoire.
L’IPL est supposé être un outil d’appréciation des tendances de la logistique au niveau mondial et d’évaluation des principaux facteurs impactant la performance du secteur.
«L’examen des résultats de l’édition 2018 révèle des aberrations incontestables telles l’intervalle de confiance, les limites de la méthodologie utilisée ou encore le nombre de répondants qui n’a pas dépassé 13. Par conséquent, donner à l’IPL une vocation d’outil d’appréciation sur lequel les pays devront s’appuyer pour développer la logistique reste une orientation à prendre avec beaucoup de précautions», précise Tahri.
L’élaboration de cet indice est basée sur une enquête de perception des opérateurs comportant un aspect subjectif et les résultats sont souvent influencés par des événements conjoncturels s’ils coïncident avec la période de l’enquête. Des grèves ou des perturbations temporaires dues au renforcement des contrôles aux frontières en rapport avec la lutte contre certains trafics peuvent influencer la perception des chefs d’entreprise.
L’Observatoire affirme également que «l’enquête, qui a démarré en 2007, ne s’est pas améliorée en termes de capitalisation sur les expériences passées». Le calcul du classement d’un certain nombre de pays, dont le Maroc, a été marqué par des erreurs qui n’ont pas été corrigées en 2016. De plus, certains critères sont mesurables et ne nécessitent pas d’enquête.
Par ailleurs, les indices de la performance logistique peuvent parfois être contradictoires. En effet, au niveau du continent africain, le Maroc est classé 10e en termes de qualité des infrastructures. «Cependant, selon la même source, le Maroc est mieux noté au niveau des infrastructures».
Sur les 23 milliards de DH d’investissements directs étrangers captés par le Maroc en 2016, plus de 23% ont été alloués au secteur de la logistique. Soit la part la plus élevée en Afrique
Malgré ses limites, l’indice de performance logistique reste une référence internationale de l’avis des opérateurs privés dans la prise de décision et leurs projets d’extension.
Faisant l’objet d’une feuille de route 2010-2030, la logistique a connu une croissance annuelle moyenne en volume de 3,47% avec la création de 24.000 emplois nets durant la période 2010-2016 chez les logisticiens. La logistique comprend également le secteur du transport, à l’exception de celui des voyageurs. Les deux secteurs réunis emploient 169.000 personnes à fin 2016.
L’année 2016, date à laquelle s’intéresse l’Observatoire qui n’est devenu effectivement opérationnel qu’en 2017, a enregistré un investissement de l’ordre de 32 milliards de DH dans la logistique. Il est porté par le ministère de l’Équipement, les entreprises et établissements publics, ainsi que les prestataires logistiques.
Ce qui représente 10,4% de la formation brut du capital fixe. Il s’agit de la construction ou de l’extension d’autoroutes, de ports et d’aéroports par le public et de parcs logistiques et l’achat de moyens de transport par le privé (6,8 milliards de DH, soit 25% des investissements) et les entreprises et établissements publics (SNTL, ONCF, ANP).
Le montant de 32 milliards de DH d’investissement ne tient compte que de ce qui a été payé au cours de l’année 2016, sachant que les grands projets tels des tronçons autoroutiers ou des ports sont livrés sur plusieurs années.
«L’évolution de la stratégie logistique est à la fois tributaire de l’évolution du PIB et de l’externalisation de cette fonction par les entreprises. Ainsi, la contribution nette de la logistique au PIB n’est que de 2,53%. C’est la valeur ajoutée créée chez les chargeurs», signale le président.
Selon le benchmark effectué au niveau des pays les plus avancés, pour que le coût de la logistique baisse de 20 à 15%, il faut que la valeur ajoutée varie entre 8 et 10%. Dans le cas du Maroc, elle n’est encore que de 2,53%. Par conséquent, le Royaume a encore une large marge de rattrapage.
En 2016, la logistique a généré une valeur ajoutée de 45 milliards de DH, soit 5,02% du PIB. L’indicateur tient compte de la combinaison entre les opérations réalisées par les prestataires et leurs effets indirects d’une part et les opérations réalisées in-house d’autre part. En termes d’emplois, la logistique pour ces mêmes opérations emploie 445.000 personnes y compris les industriels et autres chargeurs. Soit 4,18% de la population active occupée. La contribution de la logistique à la formation du PIB en 2016 est estimée à 22,7 milliards de DH.
Source : LECONOMISTE